Étude des principales dates du calendrier hégirien telles que fixées par les autorités saoudiennes

I. Introduction
Comme chacun sait, pour tout lieu donné, le nouveau mois islamique débute lorsque le jeune croissant de lune est visible dans le ciel du soir. Traditionnellement, l’observation de la nouvelle lune est acceptée par la communauté si elle est rapportée par deux témoins dignes de confiance.

Ce qui est vrai en général l’est bien sûr pour la ville sainte de Makkah. Le calendrier de Makkah est d’une importance particulière à cause du pèlerinage annuel qui s’y déroule, le Hajj. Cet événement attire des millions de pèlerins en provenance du monde entier. Il est donc d’un intérêt capital que les autorités saoudiennes fixent chaque année une date exacte pour le Hajj. En raison de la place que Makkah occupe dans le coeur de tout musulman pieux, il est tout aussi important de fixer avec exactitude les dates des deux autres grands jours de fête de l’islam : le début et la fin du mois de jeûne de Ramadan.

Notre projet d’établir un calendrier scientifique exact pour Makkah, basé sur le calcul et les prévisions de visibilité de la nouvelle lune, élargit la notion de visibilité à Makkah par-delà le coucher de soleil qui suit la naissance de la nouvelle lune. Chaque mois, le croissant, invisible au moment de la conjonction, le reste encore pendant au moins les dix heures qui suivent. Cependant, au lieu de s’en tenir à l’observation du croissant à Makkah au coucher du soleil, il est tout à fait légitime de s’accorder davantage de temps, et de prendre en considération l’intervalle de temps entre le coucher du soleil et la première prière du matin (fajr) le lendemain.

Dans la pratique, nous examinons l’état de visibilité du croissant à l’ouest de Makkah dans le cas où il n’y a aucune visibilité à Makkah même. Si quelque part à l’ouest, sur la terre ferme, le croissant est visible avant fajr à Makkah, nous considérons que cette visibilité est acquise à Makkah même. Nous appelons ce concept le concept de la visibilité étendue.

À chaque nouvelle lune, si aucune observation n’est possible à Makkah même, nous établissons la possibilité d’une observation à l’ouest de la ville sur la base des calculs des courbes de visibilité. Ces courbes ont été définies par Syed Khalid Shaukat. Le lecteur en trouvera des exemples sur le site de Shaukat, www.moonsighting.com ou sur notre site, calendrier islamique pour Makkah. Sur la base des prévisions de visibilité du croissant, nous avons demandé des images à des photographes d’observatoires reconnus ou à des astronomes, aux États-Unis, au Canada, en Argentine etc. Vous trouverez dans la galerie photo de notre site internet une remarquable collection de photographies de jeunes croissants. Ces photographies constituent la preuve évidente de l’exactitude de nos courbes de visibilité.

Pour des explications détaillées, le lecteur pourra se référer à l’introduction de notre site internet et à la foire aux questions. Pour une approche plus scientifique, l’article figurant dans la rubrique « Annonces » de notre site internet, publié dans une revue scientifique internationale reconnue, Selenology Today, pourra se révéler intéressant.

II. Le calendrier officiel utilisé par les autorités saoudiennes [The Umm al-Qura calendar]
Pour déterminer le début du mois hégirien dans son calendrier connu sous le nom de calendrier d’Umm al-Qura, les autorités saoudiennes utilisent les critères suivants (critères applicables depuis l’année hégirienne 1423) :

Si, le 29ème jour du mois lunaire, les deux conditions suivantes sont réunies, alors le jour suivant est déclaré premier jour du nouveau mois lunaire :
1. la conjonction géocentrique se produit avant le coucher du soleil
2. la lune se couche après le soleil
Sinon, le mois lunaire courant dure 30 jours.
Il est évident que l’observation effective du nouveau croissant n’est pas prise en compte. Dans ces circonstances, on a fait état de nombreuses divergences dans la détermination du début du mois lunaire. Même si la conjonction a lieu juste avant le coucher du soleil, rendant l’observation du croissant impossible ce soir-là, on déclare le mois terminé, contrairement à la loi islamique.

III. Le Hajj (pèlerinage) et les jours de fête tels qu’ils sont fixés par les autorités saoudiennes

Soucieux de l’exactitude des principales dates du calendrier hégirien, fixées par les autorités saoudiennes, nous avons demandé à Syed Khalid Shaukat de mener une étude. À notre demande, il a eu l’amabilité de préparer trois tableaux couvrant 32 années hégiriennes, de 1400 à 1431. Ces tableaux concernent :
1. Le début du mois de Dhou Al Hijja (le 9ème jour de ce mois est le Wuquf de Arafat et le 10ème jour est le jour de Eid El-Adha)
2. Le début du Ramadan
3. Aïd el-Fitr (le 1er jour du mois de Chawwâl)
Chaque tableau contient l’information suivante :
1. Première colonne : année hégirienne
2. Deuxième colonne : date grégorienne fixée par l’Arabie Saoudite
3. Troisième colonne : date de la naissance de la nouvelle lune à Makkah
4. Quatrième colonne : heure de naissance de la nouvelle lune à Makkah (heure locale)
5. Cinquième et sixième colonnes : l’état de visibilité de la lune d’après les courbes de visibilité
Les courbes de visibilité sont une représentation graphique des conditions de visibilité de la nouvelle lune tracées sur une mappemonde. Les courbes sont basées sur l’algorithme de Yallop et ont été développées après des années de recherche par Khalid Shaukat (www.moonsighting.com) et Fawzi Kayali. Au fil des ans, ces calculs ont été vérifiés et affinés grâce à l’observation directe de la lune.
établies (plages de visibilité bleue et verte uniquement) le jour qui précède la date officiellement fixée par les autorités saoudiennes. La cinquième colonne indique l’état de visibilité à Makkah même, la sixième colonne, l’état de visibilité à l’ouest de Makkah, avant fajr à Makkah.

Saudi Arabian-1

Saudi Arabian-2

Saudi Arabian-3

Les résultats de cette étude sont troublants et nous souhaiterions les présenter à nos lecteurs pour recueillir leurs impressions.

IV. Le début de Dhou Al Hijja
Comme mentionné précédemment, le dixième jour de ce mois correspond à la date du Hajj. Notre calendrier pour Makkah permet de déterminer cette date avec exactitude, des décennies à l’avance. Mais que pouvons-nous dire des dates officielles fixées par les autorités saoudiennes, telles qu’elles figurent dans la colonne 2 du tableau de Dhou Al Hijja ? Le début du mois de Dhou Al Hijja n’est valide que si le croissant était visible le soir précédent, soit à Makkah même, soit à l’ouest de Makkah avant fajr dans cette ville sainte.

Le lecteur se rendra facilement compte, à la lecture de la colonne 5 du tableau correspondant, que pas une seule date comprise entre 1400 et 1430 ne correspondait à une visibilité du croissant à Makkah même. A l’ouest de Makkah, avant fajr dans cette ville, le croissant était visible 14 années sur les 31 entre 1400 et 1430. Les 17 années restantes, le croissant était invisible non seulement à Makkah mais aussi à l’ouest de Makkah avant la prière de fajr du lendemain. Ainsi, 17 fois sur 31 – soit plus de la moitié du temps – les autorités saoudiennes ont fixé une date erronée pour le Hajj. Nous laissons à l’appréciation de nos lecteurs la question du sérieux des autorités.

V. Le début du Ramadan
Vous trouverez dans le tableau correspondant les dates officielles pour l’Arabie Saoudite de 1400 à 1431, soit sur une période de 32 ans. La cinquième colonne montre que le croissant n’était jamais visible à Makkah même, et la sixième colonne indique qu’il était visible à l’ouest de Makkah (avant fajr à Makkah) seulement 12 fois sur 32. 20 dates sur les 32 fixées pour le début du Ramadan sont donc erronées. Que le lecteur en tire ses conclusions.

VI. Aïd el-Fitr (premier jour du mois de Chawwâl)
La situation est semblable à celle du début du Ramadan. Durant les 32 années entre 1400 et 1431, le croissant n’était jamais visible à Makkah même, et il était visible à l’ouest 12 années sur les 32. À noter : les années où la visibilité est vérifiée pour la fin du Ramadan ne coïncident pas nécessairement avec celles où la visibilité est vérifiée pour le début du Ramadan. Encore une fois, 20 dates sur 32 sont erronées.

VII. Quelques exemples particulièrement flagrants
Nous avons démontré ci-dessus que la plupart des dates fixées par les autorités saoudiennes pour les grands jours de fête islamiques ne sont pas conformes puisque le croissant ne pouvait tout simplement pas avoir été observé avant le coucher du soleil à Makkah le jour précédent. Mais que dire des cas où la nouvelle lune n’était même pas née au coucher du soleil le jour avant la date fixée pour la fête ? Ces cas sont malheureusement nombreux, comme les quelques exemples ci-dessous l’attesteront. On déclare le mois commencé le jour X, mais la nouvelle lune ne naît en réalité que ce même jour. En voici donc quelques illustrations. Pour chacune d’entre elles, nous invitons le lecteur à se référer au tableau correspondant.

Début du Ramadan
Prenez, par exemple, l’année 1403. Les autorités saoudiennes déclarent que le mois a commencé le 11 juin 1983. Le croissant aurait donc dû au moins être visible le 10 juin au soir, avant le coucher du soleil. Mais que peut-on remarquer ? La nouvelle lune est née seulement le 11 juin à 07h37 le matin. Autrement dit, la conjonction a eu lieu après le début du mois!

L’année suivante, en 1404, la même anomalie se reproduit : il avait été déclaré que le Ramadan commencerait le 30 mai 1984, mais le croissant était-il visible le 29 ? Non, il n’est pas né avant le 30 mai, à 19h48, soit le soir. Une journée entière du mois de jeûne (qui était censé avoir débuté) s’était donc écoulée avant la conjonction.

Il serait fastidieux de multiplier les exemples d’aberrations dans les dates fixées pour le début du Ramadan. Nous invitons le lecteur à observer la répétition du phénomène pour les années 1405, 1406, 1407, 1409, 1415 et 1419.

Ainsi, 8 années sur les 32 énumérées dans le tableau, Ramadan avait été déclaré comme ayant commencé alors que la nouvelle lune n’était même pas née. Dans 25% des cas !

Le premier jour du mois de Chawwâl, ou Aïd el-Fitr (fin du Ramadan)

Ici, on relève moins d’aberrations que pour le début du Ramadan, mais il s’en trouve malgré tout de nombreuses.

Prenez par exemple l’année 1404 : la fin du Ramadan avait été fixée au 28 juin 1984. Comme le début du Ramadan avait été déclaré le 30 mai 1984 (cf ci-dessus), 30 jours de jeûne s’étaient écoulés le 28 juin 1984, si bien que le nouveau mois devait absolument commencer le 29 juin 1984. Mais il se trouve que la nouvelle lune était née le 29 juin, à 06h18, le matin. Un double sacrilège a donc été commis puisque des musulmans ont été obligés d’entamer le jeûne pendant le dernier jour de Sha’aban, et de rompre le jeûne pendant le dernier jour de Ramadan !

Au lieu de multiplier les exemples, nous invitons le lecteur à consulter les lignes des années 1405, 1406, 1408 et 1416. Dans le cas des années 1405 et 1406, le début du mois est illicite lui aussi.

Ainsi, 5 années sur 32, soit dans 16% des cas, le Ramadan avait été déclaré terminé avant que la conjonction se produise.

Conclusion
Comme le montre notre calendrier pour Makkah, il est tout à fait possible d’établir un calendrier exact pour la ville sainte, des décennies à l’avance, dans le respect de la tradition islamique qui exige qu’on observe effectivement le nouveau croissant. Dans ces circonstances, peut-on justifier des dates fixées arbitrairement, d’après la conjonction seule – sans observation réelle – ou, souvent, avant même que la conjonction se produise ?